(Texte évidemment modifiable sur vos conseils)
“(…) le réformisme suppose que le capitalisme soit réformable. Tant que celui-ci conserve ce caractère, l’essence révolutionnaire de la classe ouvrière demeure à l’état latent. La classe ouvrière cessera d’avoir conscience de sa situation de classe, et elle identifiera ses aspirations à celles de la classe dominante. Un jour cependant, la survie du capitalisme finira par dépendre d’un “réformisme à rebours”; le système sera contraint de recréer les conditions qui ont conduit au développement de la conscience de classe. Lorsque ce jour viendra, le nouveau capitalisme ressemblera à l’ancien, et il se retrouvera de nouveau dans des conditions changées, face à l’ancienne lutte de classe“.
Tous les pays industrialisés subissent de plus en plus ce « rouleau-compresseur libéral» qui a rompu définitivement avec cette sorte de « compromis », de stabilisation relative dans la lutte de classe qu’avait constitué la période de croissance keynésienne soutenue par les dépenses d’Etat après la seconde guerre mondiale [*].
Plusieurs pays d’Amérique latine semblent actuellement faire exception, et sont ainsi en vogue chez les «altermondialistes ». Mais ces pays aux gouvernements « de gauche » se sont simplement émancipés de l’impérialisme américain pour (re)prendre le contrôle de leurs matières premières et redistribuer (par exemple la rente pétrolière au Venezuela). Ces états restent fondamentalement bourgeois, aucune remise en cause de la propriété privée n’y a été faite, mais ils profitent d’une fenêtre tardive de développement économique national sur des bases keynésiennes provisoires. Le recul du front de classe en faveur de la bourgeoisie au niveau mondial n’en est aucunement atténué.
Dans les « démocraties occidentales », les restes de l’ancien mouvement ouvrier (social-démocratie, post-stalinisme, syndicalisme) sont dans l’incapacité totale d’opposer une résistance. Les gauches parlementaires n’ont aucun programme à opposer pour ne serait-ce que défendre vraiment les services publics, les acquis sociaux, et entraver les délocalisations industrielles ; tant et si bien qu’elles ne cherchent même plus à opposer une quelconque résistance mais se contentent d’être des équipes de relève à la faveur des mécontentements lors des échéances électorales. Les syndicats s’accrochent aux illusions du « dialogue social » alors qu’il n’y a plus que des reculs sociaux à négocier, considérant pour s’excuser qu’un rapport de forces ne serait plus guère possible (atomisation, recul de la conscience politique des salariés). Les directions syndicales disent vouloir préserver ce qui reste des appareils qui seraient menacés par des conflits jugés perdus d’avance. Mais pourquoi préserver un appareil qui ne servirait plus à rien ?
Le réformisme est mort lorsque François Mitterrand, pour justifier la « pause » et le ralliement aux contraintes monétaristes en 1983, déclarait : « Il n’y a pas d’autre politique possible ». Tout le monde avait compris : « Il n’y a plus d’autre politique possible ». Le réformisme est mort, pas seulement à la façon dont le premier parti socialiste était mort avec la guerre d’Algérie. Il est mort car il ne s’agit plus ni de projet de transformation graduelle du système capitaliste, ni même de tirer un maximum d’avantages pour les salariés dans le cadre du marché : Il n’y avait plus d’autre politique possible ! Etre « de gauche » devenait simplement être contre la droite, puis bientôt plus rien : la « gauche » gouverne comme la droite ou presque, voire disparaît carrément comme en Italie, la « gauche » devenue inutile perd son électorat ouvrier partout. Le réformisme est mort car la bourgeoisie ne donnera plus rien, elle n’achètera plus la « paix sociale » puisqu’elle n’a plus de « guerre » à craindre, les armes ont été déposées. On ne souscrit pas une assurance contre un risque qui n’existe plus. La modération est devenue abdication.
Ainsi les conditions objectives d’une intensification de la lutte de classe (retour à un capitalisme « à l‘ancienne » et recul des droits sociaux, au moins en Europe) se heurtent aux conditions subjectives d’une décomposition au dernier degré de ce qui restait du mouvement réformiste. Jamais les salariés n’ont autant été attaqués par une bourgeoisie de combat depuis soixante ans, et jamais ils n’ont été autant démunis d’organisation pour la riposte, même limitée. Plus de miettes à quémander, la relance du taux de profit se fait dans un marché mondialisé (si vous n’êtes pas contents on délocalise) et un environnement où l’idéologie bourgeoise est conquérante (moins d’impôts, moins d’ «assistanat », plus de « liberté » pour les patrons, euh les entreprises, pas d’alternative possible…). Seules quelques révoltes d’exclus dans leurs ghettos viennent ternir ce paysage triomphant. Comment renverser cette contradiction entre les conditions objectives d’une intensification de la lutte de classe et les conditions subjectives de son étouffement ?
Il est difficile d’imaginer que la résolution de cette contradiction puisse faire l’économie d’une rupture avec les vieux appareils bureaucratiques devenus non seulement inutiles, mais entravants, entravant pour les luttes et non pour le taux de profit (rupture au moins avec leurs directions, ses discours, ses pratiques, et la culture délégatoire qui fait leur matelas). On ne pourra faire davantage l’économie d’un effort d’éducation politique et de remobilisation concrète dans l’action. Des minorités syndicales de lutte ont déjà fait beaucoup, certes sans grand résultat, mais la pénurie de militants n’a pas aidé, un effet de seuil restant probablement à atteindre.
De nombreux salariés, confrontés aux conditions objectives de plus en plus dures, reprennent le chemin d’une conscience de classe, mais sont exposés au découragement, à la démoralisation, aux déceptions. C’est notre tâche de militants de contrer le fatalisme et la résignation, de démystifier l’imposture de l’ « intérêt général », de contribuer à dégager des perspectives d’action (reconstruire un rapport de forces) et d’alternative (reposer clairement celle du socialisme). La richesse de ce monde est le fruit du travail d’une majorité de producteurs enchaînés à l’esclavage salarié ou astreints au chômage en attente d’un emploi jetable, pour le profit toujours plus exclusif d’une infime minorité. Rien de solide ne se fera en l’oubliant.
[*] Voir Pierre Souyri / La Dynamique du capitalisme au XX° siècle. Extrait sur notre site: La crise de 1974 et la riposte du capital pdf
[justify][right]
“(…) le réformisme suppose que le capitalisme soit réformable. Tant que celui-ci conserve ce caractère, l’essence révolutionnaire de la classe ouvrière demeure à l’état latent. La classe ouvrière cessera d’avoir conscience de sa situation de classe, et elle identifiera ses aspirations à celles de la classe dominante. Un jour cependant, la survie du capitalisme finira par dépendre d’un “réformisme à rebours”; le système sera contraint de recréer les conditions qui ont conduit au développement de la conscience de classe. Lorsque ce jour viendra, le nouveau capitalisme ressemblera à l’ancien, et il se retrouvera de nouveau dans des conditions changées, face à l’ancienne lutte de classe“.
P. Mattick (1968)
Tous les pays industrialisés subissent de plus en plus ce « rouleau-compresseur libéral» qui a rompu définitivement avec cette sorte de « compromis », de stabilisation relative dans la lutte de classe qu’avait constitué la période de croissance keynésienne soutenue par les dépenses d’Etat après la seconde guerre mondiale [*].
Plusieurs pays d’Amérique latine semblent actuellement faire exception, et sont ainsi en vogue chez les «altermondialistes ». Mais ces pays aux gouvernements « de gauche » se sont simplement émancipés de l’impérialisme américain pour (re)prendre le contrôle de leurs matières premières et redistribuer (par exemple la rente pétrolière au Venezuela). Ces états restent fondamentalement bourgeois, aucune remise en cause de la propriété privée n’y a été faite, mais ils profitent d’une fenêtre tardive de développement économique national sur des bases keynésiennes provisoires. Le recul du front de classe en faveur de la bourgeoisie au niveau mondial n’en est aucunement atténué.
Dans les « démocraties occidentales », les restes de l’ancien mouvement ouvrier (social-démocratie, post-stalinisme, syndicalisme) sont dans l’incapacité totale d’opposer une résistance. Les gauches parlementaires n’ont aucun programme à opposer pour ne serait-ce que défendre vraiment les services publics, les acquis sociaux, et entraver les délocalisations industrielles ; tant et si bien qu’elles ne cherchent même plus à opposer une quelconque résistance mais se contentent d’être des équipes de relève à la faveur des mécontentements lors des échéances électorales. Les syndicats s’accrochent aux illusions du « dialogue social » alors qu’il n’y a plus que des reculs sociaux à négocier, considérant pour s’excuser qu’un rapport de forces ne serait plus guère possible (atomisation, recul de la conscience politique des salariés). Les directions syndicales disent vouloir préserver ce qui reste des appareils qui seraient menacés par des conflits jugés perdus d’avance. Mais pourquoi préserver un appareil qui ne servirait plus à rien ?
Le réformisme est mort lorsque François Mitterrand, pour justifier la « pause » et le ralliement aux contraintes monétaristes en 1983, déclarait : « Il n’y a pas d’autre politique possible ». Tout le monde avait compris : « Il n’y a plus d’autre politique possible ». Le réformisme est mort, pas seulement à la façon dont le premier parti socialiste était mort avec la guerre d’Algérie. Il est mort car il ne s’agit plus ni de projet de transformation graduelle du système capitaliste, ni même de tirer un maximum d’avantages pour les salariés dans le cadre du marché : Il n’y avait plus d’autre politique possible ! Etre « de gauche » devenait simplement être contre la droite, puis bientôt plus rien : la « gauche » gouverne comme la droite ou presque, voire disparaît carrément comme en Italie, la « gauche » devenue inutile perd son électorat ouvrier partout. Le réformisme est mort car la bourgeoisie ne donnera plus rien, elle n’achètera plus la « paix sociale » puisqu’elle n’a plus de « guerre » à craindre, les armes ont été déposées. On ne souscrit pas une assurance contre un risque qui n’existe plus. La modération est devenue abdication.
Ainsi les conditions objectives d’une intensification de la lutte de classe (retour à un capitalisme « à l‘ancienne » et recul des droits sociaux, au moins en Europe) se heurtent aux conditions subjectives d’une décomposition au dernier degré de ce qui restait du mouvement réformiste. Jamais les salariés n’ont autant été attaqués par une bourgeoisie de combat depuis soixante ans, et jamais ils n’ont été autant démunis d’organisation pour la riposte, même limitée. Plus de miettes à quémander, la relance du taux de profit se fait dans un marché mondialisé (si vous n’êtes pas contents on délocalise) et un environnement où l’idéologie bourgeoise est conquérante (moins d’impôts, moins d’ «assistanat », plus de « liberté » pour les patrons, euh les entreprises, pas d’alternative possible…). Seules quelques révoltes d’exclus dans leurs ghettos viennent ternir ce paysage triomphant. Comment renverser cette contradiction entre les conditions objectives d’une intensification de la lutte de classe et les conditions subjectives de son étouffement ?
Il est difficile d’imaginer que la résolution de cette contradiction puisse faire l’économie d’une rupture avec les vieux appareils bureaucratiques devenus non seulement inutiles, mais entravants, entravant pour les luttes et non pour le taux de profit (rupture au moins avec leurs directions, ses discours, ses pratiques, et la culture délégatoire qui fait leur matelas). On ne pourra faire davantage l’économie d’un effort d’éducation politique et de remobilisation concrète dans l’action. Des minorités syndicales de lutte ont déjà fait beaucoup, certes sans grand résultat, mais la pénurie de militants n’a pas aidé, un effet de seuil restant probablement à atteindre.
De nombreux salariés, confrontés aux conditions objectives de plus en plus dures, reprennent le chemin d’une conscience de classe, mais sont exposés au découragement, à la démoralisation, aux déceptions. C’est notre tâche de militants de contrer le fatalisme et la résignation, de démystifier l’imposture de l’ « intérêt général », de contribuer à dégager des perspectives d’action (reconstruire un rapport de forces) et d’alternative (reposer clairement celle du socialisme). La richesse de ce monde est le fruit du travail d’une majorité de producteurs enchaînés à l’esclavage salarié ou astreints au chômage en attente d’un emploi jetable, pour le profit toujours plus exclusif d’une infime minorité. Rien de solide ne se fera en l’oubliant.
[*] Voir Pierre Souyri / La Dynamique du capitalisme au XX° siècle. Extrait sur notre site: La crise de 1974 et la riposte du capital pdf
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